Vous avez investi en location meublée non professionnelle (LMNP) et profitez de sa fiscalité avantageuse, mais avez-vous réfléchi à la manière dont ce patrimoine sera transmis à vos proches ? La succession ou la donation d’un bien LMNP est une opération complexe, parsemée d’enjeux fiscaux spécifiques qu’il est crucial d’anticiper. Entre l’imposition des bénéfices, la gestion de la plus-value et les subtilités du démembrement de propriété, une mauvaise préparation peut entraîner des conséquences financières lourdes et inattendues pour vos héritiers.
Alors, comment naviguer sereinement dans les méandres de la transmission d’un patrimoine LMNP ?
Conséquences fiscales du décès d’un loueur en meublé
Le décès du propriétaire d’un bien en LMNP déclenche plusieurs mécanismes fiscaux immédiats que les héritiers doivent impérativement connaître pour éviter les mauvaises surprises.
L’imposition immédiate des bénéfices et plus-values
La première conséquence est la clôture de l’exercice comptable à la date du décès. Les bénéfices générés par l’activité de location meublée depuis le début de l’exercice fiscal jusqu’au jour du décès deviennent immédiatement imposables. Les héritiers, ou plus précisément la succession, devront s’acquitter de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux sur ces sommes, selon le régime fiscal du défunt (micro-BIC ou réel).
Concernant la plus-value, le statut LMNP offre un avantage considérable. Le décès « purge » la plus-value latente accumulée par le défunt. Concrètement, le bien immobilier est réévalué à sa valeur vénale au jour de la succession. Cette valeur devient la nouvelle référence pour les héritiers. S’ils décident de vendre le bien immédiatement, il n’y aura aucune plus-value imposable. S’ils le vendent plus tard, l’éventuelle plus-value sera calculée uniquement sur la différence entre le prix de vente et cette valeur d’acquisition successorale.
Cependant, une nouveauté issue de la loi de finances 2025 vient nuancer ce tableau. Si les héritiers poursuivent l’activité de location meublée au régime réel après le décès, les amortissements qu’ils déduiront fiscalement pendant leur période de détention devront être réintégrés dans le calcul de la plus-value lors de la revente du bien. Cette mesure vise à aligner le régime des plus-values LMNP sur celui des professionnels sur ce point précis et peut augmenter significativement l’impôt dû.
Attention au piège de l’assurance emprunteur !
Si un crédit immobilier était en cours sur le bien, l’assurance décès de l’emprunteur est souvent activée. La banque verse alors une indemnité pour solder le capital restant dû. Or, fiscalement, cette somme est considérée comme un « résultat exceptionnel » pour l’activité LMNP. Elle s’ajoute aux recettes locatives de l’année et est lourdement taxée (barème de l’impôt sur le revenu + prélèvements sociaux à 17,2%). Ce choc fiscal peut représenter des dizaines de milliers d’euros, alors même que les héritiers sont déjà confrontés aux droits de succession.
Les options qui s’offrent aux héritiers d’un bien LMNP
Une fois la succession réglée, les héritiers se retrouvent propriétaires du bien meublé. Plusieurs choix s’offrent à eux, chacun avec ses propres implications.
1. Conserver et exploiter le bien LMNP
Les héritiers peuvent décider de poursuivre l’activité de location meublée pour continuer à percevoir des revenus locatifs. Pour cela, ils doivent s’immatriculer à leur tour en tant que loueurs en meublé via le guichet unique de l’INPI. C’est à ce moment qu’ils devront choisir leur régime fiscal.
- Le régime micro-BIC : Simple, il offre un abattement forfaitaire sur les loyers (50% pour la location classique, 30% ou 71% pour le tourisme selon les zones et plafonds en vigueur). C’est une option facile à gérer mais qui entraîne une imposition chaque année.
- Le régime réel simplifié : Plus complexe, il permet de déduire l’ensemble des charges (intérêts d’emprunt, taxe foncière, frais de gestion…) et surtout de pratiquer l’amortissement comptable du bien et du mobilier. Dans la majorité des cas, ce régime permet de réduire, voire d’annuler totalement, l’impôt sur les revenus locatifs pendant de nombreuses années.
Pour gérer la comptabilité LMNP et générer la liasse fiscale LMNP au régime réel, des plateformes en ligne comme Ma Déclaration Meublée proposent un parcours automatisé à un coût maîtrisé, à partir de 219 € TTC. Ces outils peuvent être une solution pertinente pour les héritiers qui reprennent l’activité, d’autant qu’ils permettent souvent une reprise automatique de la comptabilité et des règles d’amortissement depuis la dernière déclaration du défunt.
Le cas de l’indivision successorale
Très souvent, plusieurs héritiers (enfants, conjoint…) reçoivent le bien en commun : c’est le régime de l’indivision. Dans ce cas précis, la loi impose l’application du régime réel d’imposition. Le choix du micro-BIC n’est alors pas possible. La gestion en indivision nécessite une bonne entente et une organisation claire entre les cohéritiers.
2. Vendre le bien hérité
L’autre option est la vente du bien. Comme mentionné précédemment, la plus-value est calculée sur la différence entre le prix de vente et la valeur déclarée dans l’acte de succession. Cette plus-value est ensuite imposée au taux de 19% (impôt sur le revenu) et 17,2% (prélèvements sociaux), après application d’abattements pour durée de détention qui conduisent à une exonération totale d’impôt sur le revenu après 22 ans et de prélèvements sociaux après 30 ans. Pour les héritiers, le compteur de la durée de détention repart à zéro à partir de la date du décès.
Si le bien est occupé par un locataire, il faut savoir que le décès du bailleur ne met pas fin au bail en cours. Les héritiers deviennent les nouveaux bailleurs et doivent respecter les termes du contrat. Ils ne pourront donner congé au locataire qu’à l’échéance du bail, en respectant un préavis de 3 mois et en justifiant d’un motif légitime (vente, reprise pour habiter, ou motif sérieux et légitime).
Anticiper sa transmission pour l’optimiser : le démembrement
Plutôt que de subir les règles de la succession, il est possible de l’anticiper de son vivant, notamment grâce au démembrement de propriété. Cette technique consiste à scinder la pleine propriété d’un bien en deux droits distincts :
- L’usufruit : le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les revenus (les loyers).
- La nue-propriété : le droit de disposer du bien (le vendre, avec l’accord de l’usufruitier) et d’en devenir pleinement propriétaire au décès de l’usufruitier.
Le propriétaire peut ainsi faire une donation de la nue-propriété de son bien à ses enfants tout en en conservant l’usufruit. Il continue de louer le bien et de toucher les loyers, préservant ainsi son niveau de revenus.
Les avantages fiscaux de la donation en nue-propriété
Cette stratégie présente des avantages fiscaux majeurs :
- Droits de donation réduits : Les frais de donation ne sont pas calculés sur la valeur totale du bien, mais uniquement sur la valeur de la nue-propriété. Cette valeur dépend de l’âge de l’usufruitier (le donateur) selon un barème légal. Par exemple, pour un donateur âgé de 65 ans, la nue-propriété est évaluée à 60% de la pleine propriété.
- Abattements fiscaux : Chaque parent peut donner à chaque enfant jusqu’à 100 000 € en franchise de droits tous les 15 ans. Cet abattement s’applique sur la valeur de la nue-propriété.
- Purge de la plus-value : Pour un LMNP, la donation de la nue-propriété n’est pas considérée comme une cession à titre onéreux et n’entraîne donc pas d’imposition sur la plus-value.
- Absence de droits de succession : Au décès de l’usufruitier, la pleine propriété se reconstitue automatiquement entre les mains du nu-propriétaire, sans aucuns droits de succession à payer sur cette opération.
Démembrement : le redoutable piège de l’amortissement
Malgré ses atouts, le démembrement cache un inconvénient majeur pour un LMNP au régime réel. La jurisprudence et la doctrine administrative sont formelles : seul le plein propriétaire peut amortir la valeur de l’immeuble. Un simple usufruitier, n’étant pas considéré comme propriétaire aux yeux de la comptabilité, perd ce droit. Il peut uniquement amortir la valeur de son droit d’usufruit, qui est bien plus faible et s’éteint avec le temps. Cette perte de la principale charge déductible peut faire basculer un résultat fiscal de zéro à un montant fortement bénéficiaire, anéantissant l’un des principaux avantages du LMNP au réel.
Démembrement et TVA
Si le bien LMNP est dans un service para-hôtelier assujetti à la TVA, le démembrement peut aussi entraîner des complications. La transmission de la nue-propriété est considérée comme une sortie d’actif non affectée à une activité locative. Cela peut déclencher une régularisation de la TVA initialement récupérée lors de l’achat, au prorata des années restantes sur la période de régularisation de 20 ans.
La SARL de famille : une solution pour contourner le problème
Pour bénéficier des avantages de la transmission anticipée sans perdre celui de l’amortissement, la création d’une SARL de famille est une solution à envisager. Le mécanisme est le suivant :
- La SARL de famille est propriétaire du bien immobilier.
- Le parent-investisseur détient les parts sociales de cette société.
- Il ne donne pas la nue-propriété du bien, mais la nue-propriété de ses parts sociales.
Dans ce montage, la SARL reste pleinement propriétaire du bien et peut donc continuer à pratiquer l’amortissement normalement. L’usufruitier des parts continue de percevoir les bénéfices distribués par la société (les loyers après charges). Au décès, la pleine propriété des parts est reconstituée sans droits de succession. Cette structure est cependant plus complexe à gérer et nécessite l’accompagnement d’un professionnel.
La transmission d’un patrimoine LMNP est un acte qui se prépare. Que ce soit pour protéger son conjoint, optimiser les droits de succession pour ses enfants ou simplement éviter les mauvaises surprises fiscales, l’anticipation est le maître-mot. Les stratégies existent, du choix du régime matrimonial à la donation de son vivant, mais chacune comporte des avantages et des inconvénients qu’il faut peser avec soin. Se faire accompagner par des professionnels de la fiscalité et du patrimoine est souvent indispensable pour faire les choix les plus éclairés en fonction de votre situation personnelle.
FAQ – Succession et Donation LMNP
Comment fonctionne la succession d’un LMNP ?
Au décès du loueur, les bénéfices de l’année en cours sont immédiatement imposés. Le bien est transmis aux héritiers à sa valeur de marché au jour du décès, ce qui annule (« purge ») la plus-value accumulée par le défunt. Les héritiers peuvent ensuite choisir de vendre le bien (sans plus-value immédiate) ou de continuer l’activité de location meublée, en s’immatriculant et en choisissant un régime fiscal (micro-BIC ou réel, ce dernier étant obligatoire en cas d’indivision).
Quelles sont les implications fiscales d’une donation de bien LMNP ?
Donner la nue-propriété d’un bien LMNP de son vivant permet de réduire considérablement les droits de transmission, car ils sont calculés sur une base réduite et bénéficient d’abattements. Cependant, le donateur, devenu usufruitier, perd le droit d’amortir l’immeuble s’il est au régime réel, ce qui peut augmenter fortement son imposition sur les loyers perçus.
Quels sont les risques liés à la transmission d’un LMNP ?
Les principaux risques sont fiscaux. Pour les héritiers, le piège majeur est l’imposition de l’indemnité d’assurance emprunteur comme un revenu exceptionnel. Pour celui qui anticipe via une donation, le risque principal est la perte de la capacité d’amortir le bien, ce qui anéantit l’un des plus grands avantages du régime réel LMNP.
Comment est gérée la plus-value au décès d’un LMNP ?
Le décès entraîne une « purge » de la plus-value. La valeur du bien est actualisée à la date de la succession. Cette nouvelle valeur devient le prix de revient pour les héritiers. Ainsi, toute la plus-value générée du vivant du propriétaire est effacée fiscalement. L’imposition sur la plus-value ne concernera que la valorisation du bien entre la date du décès et la date de sa revente par les héritiers.
Quel est l’intérêt du démembrement pour un LMNP ?
L’intérêt principal est d’anticiper et d’optimiser la transmission de son patrimoine en réduisant drastiquement les droits de donation et en supprimant les droits de succession futurs sur le bien. C’est un outil puissant de planification patrimoniale, mais dont l’impact sur l’amortissement fiscal doit être soigneusement analysé avant toute décision.

